La pseudo énergie réactive

Nous voudrions, dans cette page, rassurer les abonnés au réseau électrique sur ce que la littérature appelle l'énergie réactive, que nous désignerons plutôt sous le terme de pseudo-énergie car elle n'a en rien les propriétés d'une énergie. Les opposants au compteur Linky l'exploitent souvent dans leur argumentation pour dresser la population contre ce compteur.

Tout d'abord – rassurons-nous – ni l'EDF, ni les autres prestataires ne facturent cette pseudo-énergie aux particuliers. Tout au plus, les courants électriques réactifs qui lui sont associés sont facturés par le biais de la taxe d'acheminement car, comme on le dira plus loin, ces courants augmentent la charge des lignes et leur coût, puisqu'elles doivent avoir des diamètres supérieurs à ceux strictement nécessaires aux seuls courants actifs.

Par contre, les industriels ainsi que tout consommateur relié directement à la haute tension, sont facturés directement en ce qui concerne cette pseudo-énergie à moins de mettre en place des dispositifs de neutralisation.

Son origine

Dans une résistance pure, le courant (courbe R noire) est en phase avec la tension (courbe rouge). Dans un condensateur idéal, le courant est en avance d'un quart de période sur la tension (courbe C bleue). Dans une inductance (un bobinage) idéale – donc sans résistance – le courant est en retard d'un quart de période sur elle (courbe L verte). Ce comportement provient de ce que ces courants obéissent aux variations de la tension (sa dérivée)1.

Dans un appareil réel, il peut y avoir des bobinages (spécialement avec les moteurs, les transformateurs, les électro-aimants) ou des condensateurs. Le courant est alors déphasé (décalé) d'un temps t sur la tension (courbe I grise). On parle d'un déphasage d'angle φ égal au rapport 2πt/T, T étant la période du courant.

Le courant réel I circulant dans l'appareil peut être considéré comme formé de deux composantes, l'une, le courant I0, en phase avec la tension, l'autre, Ir, en quadrature, i.e. décalé de ±90° ou de ±T/4 ; ces courants s'additionnent quadratiquement pour donner le courant réel I décalé d'un angle φ compris entre -90° et 90° (schéma inférieur).

Le courant I0 est fourni par les alternateurs de l'EDF. Et le courant Ir ? Tous les textes accessibles par Internet disent qu'il est également fourni par le réseau et que nos appareils en sont consommateurs. Nous pensons – mais c'est personnel – qu'il en est autrement. Ce courant serait généré par nos appareils puis envoyé dans le réseau. Il faut alors que le réseau dispose d'un consommateur pour ce courant Ir avant qu'il chemine sur de trop longues distances et parvienne aux alternateurs.

La neutralisation des courants réactifs

1. Le meilleur consommateur ou neutralisateur d'un courant réactif est une impédance conjuguée, c'est-à-dire des condensateurs si le courant réactif est en retard, ou des bobinages (des selfs) s'il est en avance. Nos appareils étant en majorité plus selfiques que capacitifs, les courants réactifs sont généralement en retard ; ils ne rencontrent pas assez de systèmes capacitifs dans le réseau et la compensation naturelle est généralement incomplète.

2. Les lignes électriques produisent elles-même du courant réactif. Les lignes aériennes à conducteurs très écartés sont selfiques et ne participent pas à la compensation désirée, mais au contraire ajoutent des courants réactifs. Par contre, les lignes enterrées ou compactes (conducteurs accolés) sont plus capacitives que selfiques et participent heureusement à la compensation. C'est peut-être une des raisons pour laquelle l'Edf (Enédis maintenant) utilise de préférence des câbles compacts, même en aérien2.

3. Ces dispositifs étant rarement suffisants, l'Edf (ou les compagnies distributrices d'électricité) cherchent à réduire ces courants réactifs, car ils circulent réellement dans les conducteurs et les échauffent, ce qui oblige le fournisseur à surdimensionner ses lignes. C'est pourquoi, ce dernier pénalise financièrement les gros producteurs de courant réactif, sauf s'ils les absorbent in situ (dans leur installation) par des dispositifs appropriés, en pratique toujours par des batteries de condensateurs.
Si malgré ces précautions, les courants réactifs parvenaient à la centrale, ils perturberaient le fonctionnement des alternateurs et diminueraient leur rendement.

En conclusion

Pour les particuliers, il faut retenir que nos fournisseurs ne facturent pas les courants réactifs, ni la pseudo énergie associée, qui s'exprime en kVAhr (kilovolt-ampères-heures-réactifs). Mais d'une part, ces fournisseurs en tiennent compte pour le dimensionnement des leurs lignes, ce qui affecte la taxe d'acheminement ; d'autre part, c'est le courant total (courant réactif compris) qui actionne nos disjoncteurs (ils sont de type thermique) ou fait fondre nos fusibles ; c'est donc lui qui limite la puissance disponible. Il est donc normal que notre fournisseur calibre notre disjoncteur principal en kVA et non en kW, même s'il ne facture que les kWh consommés. Si l'usager domestique produit trop de courant réactif, il sera pénalisé ipso facto parce que la puissance dont il dispose sera inférieure à la puissance souscrite. Mais ceci n'a rien à voir avec le linky.

Un particulier peut-il maîtriser sa production de courant réactif, donc réduire l'angle φ de son installation (on dit aussi augmenter son cos φ, lequel devrait tendre vers 1) ? Le commerce ne fournit pas de batteries de condensateurs agréées ; on ne peut que rester passif, sachant que les appareils produisant du courant réactif sont principalement les moteurs, mais aussi les alimentations de tubes fluorescents, celles des calculateurs, téléviseurs, télécommandes ... ainsi que, dans une moindre mesure, les chargeurs des téléphones et autres appareils portatifs, tout ce qui contient des transformateurs. Ils n'en produisent, évidemment, que lorsqu'ils sont en fonctionnement.
 


  Notes

1. Par exemple, en ce qui concerne un condensateur de capacité C : sa charge Q sous une tension V est Q=CV et le courant qui l'alimente sera i = dQ/dt. En courant alternatif avec une tension sinusoïdale V = V0 sin(ωt), ce courant devient i = CV0 cos(ωt), c'est-à-dire i = CV0 sin(ωt + π/2). Il est bien en avance d'un quart de période sur la tension.    Retour

2. Il existe des lignes purement résistives, c'est-à-dire sans inductance ni capacité, si elles sont correctement raccordées à leurs extrémités : câbles coaxiaux, lignes bifilaires et, dans une moindre mesure, lignes torsadées. On les utilise en haute fréquence, par exemple pour réunir les antennes aux émetteurs ou aux récepteurs de radio-télévision, mais aussi en téléphonie classique et dans toutes nos liaisons filaires informatiques. Ces lignes ne rayonnent pas ou très peu.    Retour
 


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